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........Quand je me réveille le matin je vois des briques en file indienne. Je ne suis jamais dans ses bras, je suis collée contre le mur et généralement enroulée dans la couette. Et tous les matins dans son lit j’ai l’impression d’être projetée dans cet autre lit, ce matin Là, à coté de Gary.

Chez Gary il y’avait des tentures partout, les draps africains aux murs. Des objets fantastiques qu’il avait ramenés de tout ces pays chauds dont il m’avait parlé pendant toute la soirée.

J’étais congelée dans sa chemise et il dormait comme un bébé. Je savais que c’était la première et la dernière fois que je serai dans ce lit, alors je comptais chaque secondes avant qu’il se réveille comme j’aurai pu compter les moutons pour me rendormir. Mais la nuit était passée, j’allais partir et oublier. Dans le lit de Sacha j’ai le droit de croire que je reviendrai bientôt, le lendemain ou le week end, peut être encore l’année prochaine…mais je revis la même impression chaque fois, je suis seule dans un grand lit, il fait froid, j'ai froid et pourtant je voudrais y passer ma vie.

Je garde les yeux ouverts et fixes sur ce plafond, j’avale cette chambre et ses meubles, je la fais mienne puisqu’elle est sienne, lui et sa respiration muette et sa bouche entrouverte trop parfaite.

J’engloutie cette chambre et son extraordinaire distance, cet autre monde que j’investi sans prendre pied. Comme un faux sol et un faux plafond, en apesanteur. Elle n’est pas mienne et mon sac qui git par terre est en transparence absent du décor et déjà disparu. Il respire un peu plus fort et je le regarde sans oser bouger. Cette chambre n’est pas à moi comme l’a été celle d’Edouard, comme elle était vide sans moi et comme notre espace fusionnait : mes affaires rangées dans son armoires mélangées aux siennes, chez moi, mes partitions étalées partout et le piano, mes tortues sur la table de nuit, mes sacs, mes produits sur l’étagère, les vernis à ongles, les dvd et les livres….

Quand il se réveille comme s’il se réveillait tout seul je vois le temps s’accélérer…

Gary ne s’est pas levé quand je suis parti le matin avec mes affaires sous le bras…il a eu l’air de ne pas comprendre ce qui lui arrivait quand je l’ai embrassé sur la joue en lui disant « à tout a l’heure ».

Sacha ne se réveille jamais, il dort et il dort, il dort comme pour me fuir, ne sachant si me regarder ou garder les yeux fermés, il sait que je suis là et le temps s’allonge.

Je fixe ces briques sans réfléchir, décelant la moindre aspérité, la trace de peinture qui attire l’œil, de laquelle on ne se détache pas.

Je l’écoute respirer, on n’entend même pas sa respiration quand il dort, je l’invente. Il inspire subitement des fois quand il veut bouger et je crois un instant qu’il se réveille et puis le silence retombe aussitôt.  Je promène mes yeux sur les murs, je pense que je devrais encore dormir, mais je suis incapable de refermer les yeux, il y’a trop de lumière dans cette chambre, je ne peux dormir que dans le noir.

J’invente sa main sur mon ventre.

Alors je dessine sur les murs, il me faut recouvrir le blanc immaculé pour manger cette pièce, pour qu’il ouvre les yeux tous les matins sur mes dessins, pour que s’il me quitte les serpents de Laocoon l’engloutissent en cauchemar.

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