Je suis injuste avec la vie, cette inconstante Irma qui me couvre de cadeaux et que je lui jette à la figure ingrate que je suis. Elle est une mère trop généreuse comme si tous mes souhaits se voyaient exhaussés. Mais je ne sais voir que leur fin et m’épancher sur eux durant des années sans réaliser que les suites sont toutes aussi belles. Je suis une idiote insatisfaite.

 

Depuis deux semaines je pleure la fin de mes vacances. Je pleure mes heures de taff dans les rayons, mes collègues adorables…les fous rires et les étranges clients. Je pleure mes soirées dans ses bras, sa couette qui perdra mon odeur et mon dessin en plan sur son mur.

Je vais prendre mon Tgv…je vais m’envoler à nouveau sur les rails rouillées et m’enfoncer chaque matin dans le métro humide. Je vais rencontrer de nouvelles personnes, je vais avancer. J’enrageai des heures perdues dans son lit, de ces insomnies insolentes et des minutes qui me narguaient comme son souffre paisible et ses yeux fermés. Je les adore aujourd’hui car si j’avais dormi je n’aurais pas eu en mémoire chacun des traits de son visage, chaque défaut du mur, le propre alignement des briques, et chacune des ombres de la rue portée au plafond. Ce silence et son souffle…je moi dans ce grand lit, sa main inerte dans la mienne…et j’enrageai, et j’aime ce souvenir.

Mon tgv traverse les champs, je rentre à Lille pour la première fois depuis mes partiels. Mon cœur fait des bonds et j’ai chaud au ventre. Je suis heureuse à cet instant, c’est une belle sensation.

Mon danseur est au conservatoire cet aprem, il danse, il vole, et je glisse sur les rails…je vais le retrouver ce soir et ne pense plus à rien d’autre qu’à son « je t’aime » de ce matin, c’est ma promesse, son cadeau d’adieu, juste un mot qui ne tient à rien, peut être à un fil et à son cœur. Le paysage qui glisse, c’est joli quand on regarde.

Sophie et Romain dans les cartons, la foule dans les rayons, le silence dans sa chambre et les briques au plafond.

Advienne que pourra, cette minute est délicieuse.