Le mec me sort

« Elles sont où les serviettes ? »

« Sur le présentoir monsieur »

Ça fait dix fois qu’on me le demande.

Encore dix heures et je vois Sacha. Faut que j’arrête de compter je me fais du mal.

« hey ma belle viens voir »

Céline une des pétasses manager m’attrape par l’épaule armée de son planning de la mort qui tue et sur un air doucereux me questionne « tu peux travailler cet aprem ? »

« ouai. »

Ouai soyons fous. 9h de mcdo, ça fait rêver. Un client s’approche de ma caisse. Il a une tète de tyrannosaure rex.

Son pote à une tète de rien. Il commande sans décoller son portable de son oreille, rigole sans chercher à m’aider, je me retiens de passer par-dessus le comptoir pour lui faire avaler son tel avec du ketchup et de la mayo…il me fait des petits gestes de la main genre

« Met ce que tu veux »

Une fois la commande assemblée sur le plateau il me fait tout en parlant :

« C’est à emporter au fait »

Je mets tout dans des sacs…dix minutes après il raccroche.

La commande emballée, il ouvre pour vérifier et me fait :

« Hey c’est pas ce que j’ai commandé »

« Je suis désolée, j’ai du mal comprendre, fallait mieux articuler monsieur »

« Bah ouai mais j’veux pas de ça »

« Faut recommander alors. C’est ce que vous avez payé, fallait modifier avant de régler la commande » 

« Appelez-moi un manager alors. »

Je l’envois balader gentiment. Et putin j’ai trop chaud!

La meuf du drive fait buguer la machine à glaces…faut attendre et toute les commandes sont bloquées…haha, tout le monde bouffe des glaces on se croirait à Boulogne plage.

« Hey Pauline accélère »

« J’m’apelle Mathilde »

« ouai, j’préfère t’appeler Pauline »

« Et moi j’aime pas la gueule que tu te payes, tu t’appelles Maxwell vieux gars d’où t’aime pas mon prénom ? »

Il continu de brailler en stagnant devant la machine à mc flurry…

« Allé les filles on se bouge, on déblaye, Pauline, Sandra, allé »

Une vieille se met à grogner parce que je lui rends dix centimes en pièce de un…elle veut qu’on ouvre une autre caisse pour trouver une pièce de dix…elle aime pas la petit monnaie. Je me demande une seconde si je kifferai pas lui faire avaler une par une les petites pièces que je tiens dans les mains.

…Les clientes d’après sont adorables, je me perds dans leur commande, met trois heures à assembler le tout sur le plateau après avoir changé deux fois la monnaie de ma caisse sans qu’elles ne disent rien et ne me fassent de reproche. Je leur souris sincèrement en les remerciant des yeux. James a la classe dans sa chemise blanche de manager…il garde le sourire, il se marre presque.

« Excusez moi, vraiment…la fatigue hein…et puis le clip de Justin…waa… »

Elles se marrent et gloussent,

« ouai graaaavve, trop beeaaaauuu… »

Ah voila j’ai détourné l’attention niark.

James reste a coté de moi, dans mon dos, à trois centimètres de moi… aaaggr c’est pas tenable et marmonne

« Je t’aide à faire la prochaine, sinon on va dire que les managers branlent rien »

« bah c’est vrai » pourquoi j'ai dis ça ??!!!

« hahaha » …

--> Tout ça pour pas me dire que j’galère avec mes commandes.

Il me dit de rester au comptoir et se penche sur mon plateau d’un peu trop près, je m’éloigne, son parfum m’agresse.

Un homme s’approche avec un pot de bébé verdâtre et me demande de le faire chauffer.

Je m’accroupie près du micro onde, allé, 40sc ça passe ? Je m’affale contre le mur et finie accroupie entre la pointeuse et la poubelle. J’enlève ma casquette. Tony stop net devant moi, il bloque. Il m'observe. Il doit se demander si je m'apprète pas à planter une tante.

« Wech vazy t’fais quoi la miss là ? C’est l’heure de sieste »

Je me relève brusquement « nan je chauffe... heu, fais chauffer un ...blédina »

Il se barre sans calculer. Woo c’est bon. Je tiens plus sur mes jambes.

J’ai entrouvert le pot, il a pas l’air de chauffer…je remet quelques secondes et attend.

« Hey t’as mis combien ? Ça va être trop chaud t’es ouf ! »

J’ouvre, j’attrape le pot et là le drame : une bulle explose à la surface du pot maudit et gicle sur mes doigts, je lâche le pot comme je peux en hurlant à la mort, secouant mes mains brulées au 45^e degré, on accoure…

« Attend, va mettre de l’eau, ça va ? De la crème, des glaçons, attend »

James arrive avec serviettes-glaçons-biafine…j’ai les yeux plein de larmes tellement je crame…des cloques plein les doigts. Il prend une de mes petites pates meutrie et touche avec un doigt les brulures tout doucement « aggrr » je fais. A la grimace qu’il fait j’ai l’impression qu’il souffre aussi pour moi. Mouhahah! Il a lâché sa caisse, c’est sympa, je passe avant le client. J’aime bien. Avec mes conneries, je viens de bloquer la moitié du resto.

Tony déclare

« T’es interdite de micro-onde. »

Je souris…ok.