J’aurai pu partir. Pourquoi rester, il ne sait pas ma gaieté enfantine, mon énergie, ma sensibilité. Il ne voit en moi qu’un substitut a celle qu’il avait imaginé avant moi. Peut était il trop lâche pour me quitter, peut être attendait-il que je le fasse pour lui. ..

Mais qu’importe ma fierté, je voulais le regarder des heures et comprendre, je ne voulais pas croire en l’échec, je ne voulais pas souffrir seule, je croyais encore en lui stupidement, m’auto-lapidant de cette faiblesse, je voulais encore croire…

Même en le regardant avec mépris des heures durant il n’aurait pas compris le dégoût qu’il m’inspirait. Et je l’aime toujours ! Pourquoi ?! Je regrettai d’avoir passé des heures à lui écrire ce que j’étais, à lui dire des choses qu’il n’a pas comprises. J’aurai voulu lui faire relire à voix haute en l’observant, pour voir si peut être tout lui apparaissait maintenant clair.

Je me sentais minable de m’être abandonnée à lui, abandonnée à ses mains idiotes, d’avoir esperé et attendu des jours et des semaines qu’il les pose sur moi, d’avoir eu envie qu’il me touche. Je regrette ces heures à me faire belle pour qu’il me regarde. J’avais envie de lui, envie d’un mec qui méprisait mon corps au point d’en désirer un autre. D’aimer un mec qui me méprisait toute entière au point de caresser une autre peau que la mienne, de toucher d’autres lèvres, de pénétrer un autre corps.

Je me sentais idiote devant lui, je le regardais dormir et mes débris, ma crédulité, ma naïveté se transformaient en force. Je me sentais libérée, je pensais à sa bêtise, je pensais qu’elle et lui ne valaient rien…qu’ils étaient des animaux et que mes idéaux lyriques, mes contes de fée et ma conception de l’amour valaient mieux…qu’il y’a partout autour de moi des Nico, capables de me caresser des yeux toute une nuit sans rien réclamer, sans rien attendre d’autre que ma présence... je regrettais d'avoir songé a lui accorder ces choses, d'avoir failli me réduire à cette pauvre loque sans personnalité,  cette pauvre merde qu'il a baisé.

« Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux et lâches, méprisables et sensuels ; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées ; le monde n’est qu’un égout sans fond où les phoques les plus informes rampent et se tordent sur une montagne de fange ; mais il y’a au monde une chose sainte et sublime, c’est l’union de ces deux êtres si imparfaits et si affreux. On est souvent trompé en amour, souvent blessé et souvent malheureux ; mais on aime, et quand on est sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arrière, et on se dit : j’ai souffert souvent, je me suis trompée quelque fois ; mais j’ai aimé. C’est moi qui ai vécu et non pas un être factice crée par mon orgueil et mon ennui. » Musset.

Je lui ai relu cinquante fois cette tirade parce qu’elle était magnifique, sans vraiment la comprendre. Il ne s’extasiait pas…est ce qu’il comprenait lui ? Je croyais qu'il n'était juste pas sensible à la beauté des mots...

Finalement s’il a tout brisé, si jamais plus je ne le verrai magnifique comme il m’apparaissait, si je regarde ce tableau dans sa chambre où il apparaît presque déifié, brillant et surnaturel, je regrette mais je ne suis pas triste, je l’aime, et d’être avec lui me suffit. Musset le dit mieux que moi.

Je veux qu'il me récupère, qu'il me redonne une quelconque valeur, s'il s'arretait de pleurer?

S'il ne souffrait pas vraiment?....

je voudrais me rendormir dans le passé et retrouver la beauté de mon histoire fébrile.